Les développements de la démocratie au Canada sont tout à fait fascinants. Le peuple canadien par centaines de milliers, par millions, autour du parlement à Ottawa, manifeste la défense de ses intérêts selon lui bafoués par ses représentants parlementaires. Et de manière très démocratique, ces représentants du peuple ont placé des tireurs d’élite sur le toit dudit parlement barricadé, au cas où il faudrait assassiner le peuple s’il s’avisait de vouloir entrer dans la maison du peuple, le parlement. Ces tireurs d’élite obéissent loyalement aux instructions du chef du peuple, actuellement en fuite et caché démocratiquement dans un trou à rats aux États-Unis… Les grands principes démocratiques du Pouvoir canadien n’ont jamais été aussi clairs : en démocratie, les ennemis du peuple c’est le peuple. Pour protéger le peuple du peuple il faut donc assassiner le peuple, pour sauver la démocratie du peuple. C’est quand même clair, non ? Lorsque le peuple réclame la liberté, il faut l’assassiner pour le rendre libre. Un peuple libre est un peuple mort. Qu’est-ce que vous ne comprenez pas ? L’idéal démocratique est un idéal sans peuple. Le peuple ne comprend pas cet idéal… Alors autant l’assassiner. Pour le bien du peuple il faut assassiner le peuple. On y voit enfin plus clair dans ce merveilleux idéal, qui se sent tellement souillé par le peuple. Ainsi ce sublime idéal démocratique du peuple s’accomplit finalement par un sacrifice : le sacrifice du peuple. Ces dizaines de milliers de routiers qui ne veulent pas être sacrifiés mettent donc en péril ce sublime idéal. Voilà la vision admirablement claire du Pouvoir démocratique canadien qui n’hésitera évidemment pas à massacrer le peuple pour protéger les intérêts du peuple, en envoyant l’armée, l’armée du peuple bien évidemment. C’est l’apothéose démocratique ! Le pouvoir démocratique canadien ne prend même plus le temps d’expliquer aux dizaines de milliers de routiers et aux millions de manifestants aspirant à la liberté que la liberté existe déjà depuis Condorcet et Mirabeau… depuis Saint-Just, cet amoureux fou de la démocratie… et que à quoi bon réclamer sa liberté si elle existe déjà dans les textes… La démocratie canadienne a tellement triomphé que le Pouvoir démocratique ne cherche même plus à faire comprendre à ces dizaines de milliers de routiers qui veulent faire crever cette démocratie pour permettre au peuple d’accomplir librement son destin que le peuple a déjà accompli son destin, et ce destin s’appelle : la démocratie. Le Pouvoir démocratique recommande seulement au peuple de connaître ses intérêts… : l’homme du peuple devrait écouter démocratiquement ces sages tueurs d’élite lui expliquer pourquoi il est dans son intérêt de ne pas entrer dans la maison du peuple, et pourquoi s’il force l’entrée il recevra dans son intérêt et dans son crâne quelques rafales de balles réelles. Si on le laissait faire, le peuple entrerait dans la maison du peuple et établirait le pouvoir du peuple pour le peuple et par le peuple enfin uni autour de valeurs communes. Un coup d’État du peuple ! Démocratiquement inadmissible. Mais quelles sont leurs valeurs ? Faire triompher des valeurs morales plutôt que des valeurs à la Bourse ? Ah, ses ennemis de la démocratie… Et quel est leur modèle, Novak Djokovic ? Ne jamais céder sur ses convictions même face au gouvernement australien qui protège démocratiquement les intérêts du peuple australien ?… Écoutez-les menacer la démocratie : « Nous avons le droit et le devoir d’accomplir notre destin d’Homme, comme Novak a accompli le sien »… voilà où en sont ces ennemis de la démocratie… Nous sommes arrivés à un point où la démocratie n’en peut plus du peuple, elle est malade du peuple, elle veut se soigner, se guérir… Puisque le peuple n’a pas voulu comprendre les vertus démocratiques, puisqu’il oblige les représentants du peuple à s’engager dans une guerre civile, alors ils en finiront avec le peuple, en le piquant au besoin. Un avenir clair s’ouvre enfin à l’humanité démocratique débarrassée du peuple, parce que tout bien considéré le peuple ce n’est pas l’humanité, en tous cas en démocratie. Désormais, au fronton des grandes démocraties il faudra graver ceci : « Le peuple n’est pas l’humanité, seuls les élus sont l’humanité ». Si vous n’êtes pas élu vous n’êtes pas un être humain, et si vous n’êtes pas un être humain, vous avez le devoir d’être les esclaves des élus avant d’avoir le droit de succomber sous leurs balles réellement démocratiques. Non, véritablement, les développements démocratiques en Occident sont tout à fait fascinants. Mais le plus fascinant reste que cette démocratie croit pouvoir exporter son idéal en Russie…