Souhaitant un prompt rétablissement à l’auteur des Enfants de minuit, j’aimerais ici lui rendre hommage. La fureur, la haine et le fanatisme ne passeront pas, la liberté de parole triomphera, la vraie liberté littéraire, celle pour laquelle Salman a consacré son temps toute sa vie durant et avec tant de bravoure. Et pour qu’elle triomphe tout à fait, je vais utiliser mon pouvoir magique : remonter le temps, à l’époque des Israélites dans le désert du Sinaï, au moment où leur vint l’idée de façonner un Veau d’or. Je vois bien leur enthousiasme et leur allégresse au pied des montagnes. Un bel ouvrage en émergea, brillant sous le soleil de plomb devenu or. Ces Israélites furent les premiers alchimistes dans leur haillons puants de leur sueur cupide. Au crépuscule, le Veaurifère fut achevé et les festivités veauciférantes commencèrent autour de la nouvelle idole, une danse bestiale agitée de tous les délires ébranla alors le désert. Le vin coula sur les femmes en liesse et en transe devant le nouveau dieu, en particulier Ruth, qui s’imposa comme la grande prêtresse du Veau d’or, en recevant sa consécration des deux prêtres de cette grande bestialité festive : Babattali et Bababotul. La danse des haillons puants emporta la foule dans tous les excès, on baptisa cette nouvelle danse, la danse de Sodome et Gomorrhe, tout le monde y passa, femmes, enfants, hommes, vieux, vieilles… les sévices les plus abominables se déchaînèrent toute la nuit au pied du bestiau doré. Les enfants tournaient dans la danse ivre du nouvel espoir doré. Sous la clarté de la pleine lune, des enfants furent bousculés, piétinés, et leurs petits corps furent jetés au feu en guise d’offrande à la divinité dorée, ou jetés dans une grotte alentour. En fin de soirée, les petits cadavres entassés dans la grotte dégageaient une odeur pestilentielle. « C’est une véritable chambre à gaz », disaient certains. Lorsque les ennemis des Israélites s’aventuraient dans la grotte, ils mouraient d’asphyxie, ce fut un véritable génocide. D’autres ennemis s’aventurèrent, sceptiques, « cette chambre à gaz c’est des bobards », disaient-ils, mais ils moururent eux aussi. Ruth annonça la bonne nouvelle à ses congénères qui exultèrent dans le crime. Les fêtards ne commencèrent à s’endormir qu’à l’aube au milieu du sang et du vin. Babattali et Bababotul constituèrent dans la foulée le conseil du sanhédrin pour consacrer les marchands du nouveau temple à quatre pattes et aux deux cornes, et inscrivirent dans l’or les lois de la nouvelle alliance. Attirée par les cris, une prêtresse germaine, Ursula, se présenta à Babattali et prit part à la danse finissante, au bout de laquelle elle adopta frissonnante d’extase la nouvelle alliance et scella un pacte en or avec le conseil du nouveau temple à quatre pattes, puis repartit dans les forêts du nord apporter la nouvelle alliance aux peuples germaniques, qui, ne sachant pas lire, se prosternèrent devant le pacte signé par Ursula. Babattali, Bababotul et Ruth rassemblèrent le sang éparpillé dans une coupe et s’en enduisirent sur le visage pour faire des prières au dieu corné doré, prières pour que l’alliance de l’or et du sang leur apporte prospérité et santé. La nouvelle alliance se répandit en Europe, le nouveau culte de l’or et du sang y triompha. Agamemnon fit tuer sa propre fille, Iphigénie, en sacrifice au nouveau dieu pour qu’il le conduise promptement sur les flots afin de piller l’or de Troie. L’alliance de l’or et du sang parvint jusqu’à Rome où la danse de Sodome et Gomorrhe triompha dans des orgies interminables. Des guerres furent lancées partout dans le monde pour que le nouveau culte triomphe partout, pour que l’ivresse de Sodome et Gomorrhe emporte le monde, pour que l’alliance de la bestialité soit acceptée en tant que garante des droits de l’homme et de l’enfance… On fit administrer enfin aux hommes, aux enfants et aux femmes enceintes la potion du nouveau culte concoctée par le prêtre israélite Bababourla, et ceux qui n’en voulaient pas étaient exclus de la danse. Mais les exclus firent alliance, une alliance de paix et de vertu, contre laquelle l’alliance de l’or et du sang s’obstina dans une lutte à mort. L’alliance de l’or et du sang s’acharnant depuis le début à faire passer l’alliance de paix et de vertu pour l’alliance de la haine, par tous les moyens, crucifiant même la Vérité, et falsifiant obstinément les messages célestes de vérité à travers des luttes de pouvoir perpétuelles. Mais en vain. L’alliance de l’or et du sang s’effondra sur ses mensonges révélant dans son écroulement sa bestialité apocalyptique. Ayant vu tout cela, mon pouvoir magique déclina et me ramena à notre époque dans le monde merveilleusement démocratique où je pus en toute liberté mettre tout cela par écrit et le publier sans crainte d’être persécuté, convaincu en mon for intérieur d’avoir perpétué le noble combat de Salman, et convaincu surtout d’être comme lui défendu par les merveilleux apôtres de la liberté de parole.
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