Je dois bien vous avouer que le monde va tellement mal que je ne sais plus quoi écrire. Tout est noir. Tout s’effondre inexorablement dans le chaos, le plus inextricable, la guerre civile menace partout, sous toutes les latitudes. La haine et la bestialité se déchaînent chez les « élites », et chez les racailles du bas qui prolifèrent comme la gangrène. Les foules, toujours plus nombreuses et plus revendicatrices, croient toujours que les autorités finiront par les entendre. Des millions d’individus basculent dans la violence face à la dureté de la vie, de ce système inhumain de contrôle, de plus en plus impitoyable. Mais ce déchaînement de violence n’aboutira, je le crains, qu’à la guerre de tous contre tous. C’est peut-être la fin de l’humanité. Les milliards d’humiliés n’ont pas pu et ne peuvent manifestement pas faire tomber quelques centaines de puissants. À moins d’un renouveau triomphal à l’Est, ceux qui ont le Pouvoir ne le lâcheront que lorsque tout s’effondrera, lorsque la planète ne sera plus qu’un amas de cendres. On aimerait tant qu’un merveilleux événement positif nous sorte de notre pessimisme sans issue. Un événement ineffable de beauté, de lumière et de bonté. Un événement qui embaumerait le cœur des humiliés, des oubliés, des écrasés, des broyés, des ruinés, des épuisés, des assassinés, des brûlés vifs, des bombardés… Oui un fabuleux, un céleste événement qui nous redonnerait espoir, un événement adorable et plein de grâce comme l’explosion en plein vol des trois avions ramenant en France la délégation française qui a accompagné la visite présidentielle au Maroc. Une explosion sublime au-dessus des Pyrénées, sans aucun survivant, pour cause de météo catastrophique. Voilà qui réjouirait le cœur de millions de Français. Voilà un miracle qui inclinerait des dizaines de milliers de Français à croire à nouveau en la sainte providence divine. Une sorte de Titanic aérien qui inaugurerait la libération de la France. Je sais, je rêve trop. C’est une maladie chez moi. Je ne peux pas m’en empêcher. Mais il n’y a pas de liberté sans rêve. Rêver d’être libre c’est déjà l’être. Certains disent que rêver c’est se faire du mal. Je pense au contraire que se faire du mal, c’est suivre, impuissant, le flot incessant des actualités, en y allant de ses commentaires impuissants. Ah, si l’humanité savait la puissance du rêve, si seulement elle savait… Alors rêvons de quatre merveilleuses explosions, celle des trois avions, et l’explosion de joie qui s’ensuivrait… ! Rêvons tellement fort de cet événement qu’il deviendra réalité. Imaginez les scènes de liesses dans la rue ! Une liesse encore plus phénoménale que celle qui suivit la victoire de la France en 1998… ! Imaginez aussi la tête des journalistes à la télévision ! Dans toute la France, les petits, les obscurs, les sans-grades croiront entendre le chant des anges. Le paradis est si proche finalement, le paradis est dans nos rêves. Un tel événement, s’il se réalisait, nous ferait vivre une extase bien plus sublime que celle que nous pouvons ressentir lorsque nous écoutons La vallée d’Obermann de Franz Liszt interprétée par Vladimir Horowitz, enregistré le 27 novembre 1966 au Carnegie Hall de New-York… Ah que d’instants sublimes j’ai rêvés…
Viktor von Berg
31 octobre 2024 à 11 h 25 min
C’est en vous lisant que je suis conforté dans ma croyance que l’humanité est UNE. Car nous sommes vous et moi d’origine différente, de cultures différentes, de religions différentes et pourtant j’aurais pu écrire mot pour mot tout ce que vous dites dans votre chronique. J’ai aussi les mêmes rêves sur les avions! Peut-être est-ce parce que je fais désormais partie de ces usés de l’existence et de l’espérance, à voir ce petit nombre de pourris toujours décider du malheur de l’humanité. Mais où se cachent-ils donc? Une météorite genre celle d’il y a 66 millions d’années ne pourrait-elle pas en venir à bout?…
Encore merci: continuez à rêver et à nous faire rêver et surtout à nous faire espérer en l’improbable « justice karmique ».